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Des contenus ouverts à la coopération ouverte en formation, le partage sincère, du temps pour l’essentiel, interview et webinaire de Laurent Marseault le 1er octobre à 17h

Le webinaire qui a réuni 34 personnes vendredi, mis en ligne

Des contenus ouverts à la coopération en formation : l’apport du gestionnaire de formation (lms) de yesWiki

- la vidéo : https://youtu.be/75DxnwMMa88
- la prise de notes collaborative en séance : https://lite1.infini.fr/p/coopcontenu

Si des initiatives comme les MOOC, les universités thématiques ou les blogs d’enseignants ont permis de mettre à disposition des contenus pédagogiques, la coopération ouverte en co-production, en réutilisation par des enseignants ou formateurs de structures différentes est peu courante.

La plate forme Yeswiki, (utilisée notamment dans les Riposte Créative) propose aujourd’hui un gestionnaire de contenus (LMS) conçu pour faciliter la coopération ouverte en formation.

En voici une présentation par Laurent Marseault en introduction au webinaire du 1er octobre à 17h organisé par Riposte Créative Pédagogique.

Cette démarche s’inscrit dans la réponse à l’urgence de la prise en compte des Transitions écologiques et en particulier du groupe dans l’enseignement supérieur et en formation des adultes.

- S’inscrire au webinaire

Bonjour, Laurent, pourrais-tu te présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Laurent Marseault, depuis 52 ans ; je suis fils de paysan. Mon vrai métier est animateur nature et maintenant j’aide les humains à coopérer, collaborer, fonctionner en réseau en travaillant sur trois leviers : un premier levier concerne les postures politiques, un second les techniques d’animation et le troisième levier se situe autour des outils numériques. Donc j’accompagne, je forme, je réfléchis, j’échange autour de ces sujets et on me dit « secoueur de cocotier  ». Voilà, ce qui permet de résumer un peu mon activité.


Peux-tu rappeler ce qu’est YesWiki ?

YesWiki, c’est un CMS, un logiciel qui permet de gérer des contenus sur le Web. YesWiki fait partie de la grande famille des wikis, et pour rappeler les deux caractéristiques fondamentales d’un wiki, il permet de modifier un contenu très facilement et rapidement sans avoir à passer par des interfaces d’administration et il permet de revenir en arrière, si on a fait une erreur. Dans la famille des wikis, il y a médiawiki(utilisé par wikipedia), tikiwiki, docuwiki... et celui sur lequel on travaille s’appelle YesWiki.

Sa particularité, c’est de pouvoir faire à la fois des choses jolies mais surtout c’est un logiciel qui a été travaillé pour qu’il puisse se complexifier au fur à mesure que se complexifie le fonctionnement du groupe, au fur et à mesure que le groupe grandit en maturité de coopération. Si l’on regarde les deux extrêmes du logiciel, d’un côté, tu arrives sur une page, tu doubles cliques, tu écris et tu sauves ; c’est le côté extrêmement facile du wiki et de l’autre bout il y a un générateur de base de données qui permet de fabriquer des formulaires puis, en fonction des contenus, cela génère automatiquement des trombinoscopes, des cartes de répartition, des systèmes de tri, bref, un vrai couteau suisse très facilement paramétrable.


Pourquoi développer des fonctionnalités de formation sur Yeswiki ?

On s’aperçoit que ce wiki plutôt simple et potentiellement joli attire des enseignants, des formateurs qui y voient un outil utile à leur pédagogie. Ils s’étaient des fois, déjà, un peu cassé les dents sur des grosses plateformes comme Moodle. Ganesha, plateformes efficaces mais qui parfois obligent à avoir à ses côtés un ingénieur pédagogique qui connaîtra bien le logiciel pour aider à rentrer les contenus. Ces logiciels relativement complexes rebutent pas mal d’enseignants et formateurs qui veulent travailler leurs contenus de manière plus simple et plus ouverte. Une des caractéristiques de ce Wiki, c’est que par défaut il est complètement ouvert et facilite la coopération ouverte : l’idée est donc que les enseignants puissent facilement poser des contenus et que le wiki puisse ensuite permettre de diffuser les contenus le plus largement possible notamment au travers de leurs formations.

Qu’est-ce que permet de faire ce gestionnaire de contenu, ce LMS (Learning Management System)

Ce LMS [1] permet de créer des parcours. Pour cela l’installation du module LMS dans YesWiki créé automatiquement trois formulaires interdépendants :
- Un formulaire qui permet de créer des activités. Une activité peut être un contenu de cours à lire, un exercice à réaliser, une fiche à remplir, une vidéo à regarder…
- A partir de ses contenus-activités, on va créer ensuite des modules. Dans un module, un système permet de choisir les activités que tu souhaites y insérer et d’en choisir l’ordre.
- Et une fois que tu as des modules, tu vas les organiser au sein d’un parcours.
A partir d’un parcours, le système de gestion de contenus génère toutes les interfaces qui permettent à des apprenants de passer d’une étape à l’autre, de voir combien de personnes ont suivi telle ou telle partie du cours pour pouvoir éventuellement les remotiver. Cela permet aussi de chaîner les activités avec les fonctionnalités du wiki. Par exemple, dans l’exercice, leur demander de partager du contenu en remplissant un formulaire avec les fonctionnalités Bazar du wiki.

Ensuite, l’autre potentialité, c’est de pouvoir très rapidement dupliquer tout cela. Si tu trouves des contenus intéressants, tu peux aspirer l’intégralité ou une partie d’un parcours et l’insérer dans un autre wiki. Les contenus peuvent ainsi se diffuser facilement dans l’idée d’une coopération ouverte, de pouvoir facilement partager et réutiliser ces contenus.

Dans l’esprit d’un outil convivial, ce gestionnaire de contenus en formation (LMS) facilite la réutilisation de contenus, pourrais-tu expliquer ce choix ?

Il y a, pour moi, 2 niveaux qui motivent ce choix.

- La première motivation est centrée sur les apprenants. Ces personnes vont, petit à petit, être transformées par les contenus mais vont aussi potentiellement transformer les contenus. Donc il est important de permettre aux apprenants de faire un clone des contenus qu’on leur a proposés pour qu’ils puissent les mettre sur leur propre espace pour pouvoir les digérer, continuer à les commenter, à les faire vivre. Pour moi dans la formation, il y a de la transmission de pouvoir ; des systèmes simples permettant aux personnes de partir avec les contenus et de jouer avec, sont pour moi importants et permettent une certaine encapacitation.

- La seconde motivation est plus centrée sur les collègues formateurs. Leur permettre de reprendre, de ré-utiliser les grains premiers (les activités), les grains organisés (les modules) ou les grains scénarisés (les parcours) est un véritable gain d’efficience. Avec ce LMS, des personnes qui sont dans d’autres établissements, dans d’autres organismes de formation n’ont pas besoin de repartir de zéro. Cela permet de ne pas consacrer du temps de vie à refaire ce que d’autres ont déjà fait mais plutôt de rajouter de compléter, simplifier, améliorer, contextualiser... Et en rendant ces outils interopérables cela permet de produire des flux de contenus de formation, plutôt sympathiques.



Recy’Clic
Un kiosque à services et apprentissages libres, partageables, léger et en auto-hébergement [2]

Enfin, parmi les petits outils associés à YesWiki, il y a « recyclic  » système installable sur un tout petit ordinateur (raspberry) ou sur un vieil ordi à l’écran cassé (un ordinosaure) qui embarque à la fois des logiciels de collaboration mais aussi des contenus libérés. Ce petit système transportable dans son sac à dos, devient une ressourcerie de connaissances, avec des contenus de formation partageables que l’on peut installer dans une bibliothèque, un tiers lieu, un marché...

Ces outils sont conçus pour permettre aux personnes qui ont envie de partager de pouvoir le faire facilement, d’être dans ce que l’on appelle le partage sincère ou la coopération ouverte.

Que pourrait être pour toi une coopération ouverte en matière de formation ?

Dans un monde en transition, il faut se poser des questions sur vers où on va mais aussi sur comment on y va ?

Ainsi, se questionner sur l’acte d’éduquer est fondamental. On ne peut pas imaginer reproduire les modes de formation du 19e et du 20e siècle pour explorer les chemins à venir et accompagner sur ce chemin. Dans l’idée de partage sincère, de coopération ouverte autour de la formation, il est important de dégager du temps pour que les formateurs arriver à ces niveaux de réflexion et les partagent.
Il est, pour moi, affligeant de voir des gens réinventer des contenus déjà existants alors qu’il serait possible de dire « voilà ce contenu existe, vas-y utilises-le » et ainsi, le temps de cerveau dégagé, on s’en servira pour penser ce que veut dire former à la transition, aux enjeux des quelques jolis chantiers qui sont devant nous.

Ensuite, les contenus de formation autour de ces sujets des transitions, sont gigantesques. On est dans des approches qui sont forcément reliées, systémiques, complexes. Le prof qui dit qu’il a tous les contenus de formation associés, ne peut être qu’un imposteur ;-) La piste est alors, plutôt, de trouver comment créer des arborescences de contenus de formation qui permettent à l’individu de s’y promener, d’y faire son parcours, qu’il soit apprenant ou formateur.

Y-a-t-il déjà des premiers exemples pour illustrer cette coopération ouverte ou cet usage du LMS ?

Parmi les exemples d’usages visibles, il y a le réseau des Colibris qui l’a utilisé pour ses MOOC (et des milliers de personnes) et ses parcours (plutôt des petits groupes). Dans un premier temps ces contenus ont été joués de manière accompagnée : vous vous inscrivez et suivez le parcours.

Petit à petit ces contenus sont diffusés de manière plus large et on les retrouve dans recyclic, avec des personnes qui reprennent des petits grains, ou une vidéo au sein d’un grain.

Cela permet de travailler sur la notion de compostabilité [3] des contenus de formation. Des personnes font un clone, un copier-coller d’n parcours numérique-éthique parce qu’ils ont trouvé que c’était super et d’autres prennent juste un petit grain pour le réutiliser ailleurs. Un acte de formation et les contenus associés au sein d’un LMS YesWiki donne donc accès à des contenus organisés, scénarisés permettent aux personnes de déconstruire quels que soient les niveaux pour en faire ce qu’ils veulent. On est vraiment dans l’idée de compostabilité des contenus de formation. C’est intéressant factuellement mais aussi intellectuellement.


Est-ce que ce projet associé des partenaires utilisateurs ?

Alors dans les partenariats utilisateurs, actuellement, il y a deux grosses structures : le réseau des Colibris et l’UDN, l’Université Du Nous qui l’utilise beaucoup sur leurs parcours. Dans les groupes qui suivent de près, il y a les formateurs du collectif inter-animacoop, quelques personnes du CNFPT, l’IFPEK à Rennes [4], une école dédiée aux métiers paramédicaux, un laboratoire de l’IRD du côté de Marseille[[voir à ce sujet "Interview de Bénedicte Gastineau, vers un fonctionnement collaboratif d’un laboratoire de recherche et d’enseignement"]. Un petit nombre d’endroits où commence à voir quelques yeux pétiller autour de cet outil.


Quels freins et facilitations vois-tu pour son utilisation en université ou dans des organismes de formation ?

Un des principaux freins réside dans le fait que ces organisations ont déjà choisi leur LMS, un LMS estampillé maison qui des fois a été acheté fort cher, même si c’est du logiciel libre avec des coûts de formation assez importants pour que les gens le prennent en main. Et comme on a payé pour ça, choisir des outils alternatifs simples qui redonnent du pouvoir aux gens est un peu antinomique avec les idées de pouvoirs centralisés trop souvent portés par les DSI, services financiers et autres lieux de pouvoirs. Une fois que tu as payé, c’est souvent compliqué de faire autrement.

Après il y a vraiment cette idée du partage. YesWiki est un outil qui est fait pour partager et plein de personnes sont encore coincées sur le fait que c’est quand même « mon contenu de formation » et si je le partage, d’autres vont le réutiliser. En grossissant un peu plus le trait, beaucoup de personnes pensent que s’ils partagent, ils vont mourir, ils n’existeront plus, ne seront plus sollicités.

Personnellement, je sais que c’est l’inverse mais cela, tant que tu l’as pas vécu, c’est un peu compliqué à imaginer. Il y a encore beaucoup à faire en termes de partage de contenus, y compris pour des gens qui pourtant sont payés avec de l’argent public, beaucoup de personnes sont toujours dans l’idée de cacher leur copie et y compris dans l’acte de formation, ils n’ont même pas envie que les étudiants qu’ils forment puissent réutiliser leur propre contenu.

Ce sont des choses qui sont plutôt à régler sur un divan mais ce serait un autre sujet …


les interviews

- Gatien Bataille, animateur de la formation à la coopération : Cooptic belgique. et organisateur des rencontres Co-construire.
- Jeremy Dufraisse co-développeur du gestionnaire de contenus de Yeswiki
- Laurent Marseault, le partage sincère, du temps pour l’essentiel
- Florian Schmitt, développeur du LMS et accompagnateur de son usage par les Colibris (à venir)

Quelques textes en liens


[1] En technologies de l’information et de la communication, un learning management system (LMS) ou learning support system (LSS) est un logiciel qui accompagne et gère un processus d’apprentissage ou un parcours pédagogique. En français, on parle de « plateforme d’apprentissage », « système de gestion de l’apprentissage », « centre de formation virtuel », « plate-forme e-learning », « formation ouverte et à distance » (FOAD) ou « formation en ligne », et, particulièrement au Québec, d’« environnement numérique d’apprentissage » (ENA).

Ce genre de système informatique propose un espace numérique de travail (ENT) comprenant des tests d’évaluation qui sont soit soumis à validation par l’enseignant soit proposées comme activités de régulation en auto-évaluation. Un LMS s’adosse généralement à un logiciel de gestion de la formation pour la partie administrative et logistique de la formation, notamment présentielle, dans wikipedia

[2] Le projet vise à la réduction des inégalités d’accès aux savoirs en proposant un serveur web « clé en main » installable sur tous types d’ordinateur qui donne accès à des services libres et collaboratifs et à des contenus pédagogiques dans tous les domaines de la transition écologique et solidaire. De part la sobriété apportée par l’outil, la dynamique se concentrera à développer ce service comme une solution pour le réemploi des vieux ordinateurs (ordinosaures) et la réduction des déchets informatiques. Cet outil est la concrétisation d’une collaboration entre des communautés du monde du libre et des réseaux agissant pour la protection de l’environnement.

Faciliter l’appropriation de services et de contenus libres par les acteur·rices de la transition, y compris les plus éloigné·es du numérique, par la fabrication et la mise à disposition d’espaces web mobiles de coopération et par l’animation de formations hybrides centrées sur les techniques et outils d’animation de collectifs

[3] LA COMPOSTABILITÉ : POUR UN ÉCOSYSTÈME DE PROJETS VIVACES
Publié le 4 mars 2018 Romain Lalande, Laurent Marsault, https://vecam.org/_old/La-compostabilite-pour-un-ecosysteme-de-projets-vivaces.html

Voir en ligne : http://www.cooperations.infini.fr/s...

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