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Regard de Gaëlle Roche sur la facilitation de territoire

1er épisode d’une série de témoignages de praticiens de la participation

En début d’année 2020 s’est tenue la première session de formation à la facilitation de territoire, animée par l’équipe de Collporterre. Quelques mois plus tard, des participants témoignent des apprentissages qu’ils en ont retirée.

Cet article donne la parole à Gaëlle Roche, animatrice du Conseil de développement du Pays d’Auray.

En quoi la formation de facilitation de territoire a-t-elle changé ton regard sur la participation ?

La formation m’a fait changer de perspective quant à la participation en général.
Auparavant, j’envisageais la participation de mes membres [du conseil de développement] comme une mobilisation, par le prisme d’indicateurs quantitatifs (combien de personnes en réunions, combien de contributions, combien d’avis donnés…), sans forcément de vision à long terme.

Avec la formation, j’ai pris conscience que les membres du Codepa ne sont pas à considérer uniquement comme des « récepteurs » ou des « émetteurs » ou des « contributeurs » d’information, mais également comme des participants à part entière à un système d’échanges plus large.

Finalement, mon point de vue sur le rôle de chacun a évolué vers un décloisonnement, pour dépasser une vision où les membres sont uniquement des contributeurs, les partenaires des informateurs, les citoyens des récepteurs et les élus les décideurs. C’est davantage un mode de système d’échange qui permet à chacun de trouver une place identique à l’autre et surtout que tous puissent être plus acteurs de son territoire. La participation ne s’arrête plus à la mobilisation, ça se fait pas à pas.

Concrètement, en quoi cette formation a-t-elle fait évoluer ton quotidien professionnel ?

La mise en pratique se fait progressivement, mais les mesures sanitaires de la Covid m’y ont paradoxalement aidée. Le report des réunions des groupes de travail nous a en effet obligé à faire évoluer notre approche des membres et acteurs du territoire.

Nous avons mené une enquête en ligne pendant le confinement, pour comprendre la perception des membres quant à la crise et les actions prioritaires à engager dès le déconfinement. Grâce à cette enquête, j’ai maintenant une « excuse » pour aller vers les membres du Codepa et les acteurs du territoire. Nous les rencontrons individuellement, nous allons vers eux, dans leur structure, pour approfondir cette enquête. Mais surtout, nous les écoutons et leur laissons une place pour parler de leur projet, leurs envies. Nous ne venons pas avec un projet défini et définitif. C’est aussi un des apprentissages de la formation et un changement dans nos pratiques. Et ça fonctionne ! Pour exemple, un technicien qui ne venait jamais aux réunions le soir, est venu à notre AG après que j’ai pris le temps d’aller le voir individuellement.

Nous avons prévu également des soirées focus pour approfondir les besoins du territoire. Ces soirées ne seront plus préparées uniquement par le Codepa, mais en collaboration avec les partenaires. L’idée est de partir de nos besoins et de nos envies respectives, sans arriver avec une proposition déjà ficelée. Le Codepa ne sera plus le sachant, mais le facilitateur.

Nous avons également une structure membre qui se présente comme un relais du Codepa sur une commune ; et nous développons avec elle une expérimentation dans les méthodes, dans les échanges et les idées développées. C’est un changement de posture pour nous, une expérimentation dans la manière d’être et de travailler en réseau sur le territoire.

Quels sont selon toi les plus grands défis pour développer ce métier de facilitateur.ice de territoire ?

Le premier défi est de faire accepter cette notion de facilitation, parce que les résultats ne sont pas tangibles. Cela ne se voit pas ; c’est surtout un lien interpersonnel que tu as créé avec les acteurs du territoire. En fait, la facilitation de territoire, il ne faut pas forcément en parler, il faut la mettre en pratique.

Le deuxième défi, c’est d’avoir du temps pour mettre en pratique la facilitation de territoire, parce que c’est très solliciteur en terme de calendrier. C’est aussi tout un enjeu de réussir à conserver la dynamique dans la durée.

Enfin, il faut bien distinguer si on a besoin ou non de mettre en place la facilitation. Parfois, il faut rester dans une logique plus classique de mobilisation - parce que les conditions de sont pas réunies, ou parce que les interlocuteurs ne sont pas réceptifs par exemple. Parce que c’est aussi une question de tempérament, d’ouverture ; tout le monde ne peut pas adopter cette posture.

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